Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année V — Mai 1862.

(Langue portugaise)

DISSERTATIONS SPIRITES.


LES DEUX LARMES.

(Société spirite de Lyon ;  †  groupe Villon. - Médium, madame Bouilland.)

Un Esprit allait quitter forcément la terre, qu’il n’aurait pas dû visiter, car il venait d’une région bien inférieure ; mais il avait demandé à subir une épreuve, et Dieu ne la lui avait pas refusée. Hélas ! l’espérance qu’il avait conçue à son entrée dans le monde terrestre ne s’était pas réalisée, et sa nature abrupte ayant repris le dessus, chacun de ses jours avait été marqué par le plus noir forfait. Pendant longtemps, tous les Esprits gardiens des hommes avaient essayé de le détourner du sentier qu’il suivait, mais, de guerre lasse, ils avaient abandonné ce malheureux à lui-même, craignant presque son contact. Cependant chaque chose a une fin ; tôt ou tard le crime se découvre, et la justice répressive des hommes impose au coupable la peine du talion. Cette fois, ce ne fut pas tête pour tête : ce fut tête pour cent ; et hier cet Esprit, après être resté un demi-siècle sur la terre, allait retourner dans l’espace, pour être jugé par le Juge suprême qui pèse les fautes bien plus inexorablement que vous ne pourriez le faire vous-mêmes.

Vainement les Esprits gardiens étaient revenus avec la condamnation et avaient essayé d’introduire le repentir dans cette âme rebelle ; vainement ils avaient poussé près de lui les Esprits de toute sa famille : chacun aurait voulu pouvoir lui arracher un soupir de regret, ou seulement un signe ; le moment fatal approchait, et rien n’émoussait cette nature bronzée et pour ainsi dire bestiale ; pourtant un seul regret, avant de quitter la vie, aurait pu adoucir les souffrances de ce malheureux, condamné par les hommes à perdre la vie, et par Dieu aux remords incessants, torture affreuse, semblable au vautour rongeant le cœur qui renaît sans cesse.

Pendant que les Esprits travaillaient sans relâche à faire naître en lui au moins une pensée de repentir, un autre Esprit, Esprit charmant, doué d’une sensibilité et d’une tendresse sublimes, voletait autour d’une tête bien chère, tête vivante encore, et lui disait : « Pense à ce malheureux qui va mourir ; parle-moi de lui. » Quand la charité est sympathique, quand deux Esprits s’entendent et n’en font qu’un, la pensée est comme électrique. Bientôt l’Esprit incarné dit à ce messager d’amour : « Mon enfant, tâche d’inspirer un peu de remords à ce misérable qui va mourir ; va, console-le ! » Et en y pensant, en comprenant tout ce que l’infortuné criminel allait avoir de souffrances à endurer pour son expiation, une larme furtive s’échappe des yeux de celui, qui seul, à cette heure matinale, s’éveillait en songeant à cet être impur, qui dans un instant devait rendre ses comptes. Le doux messager recueillit cette larme bienfaisante dans le creux de sa mignonne main, et d’un vol rapide il la porta vers le tabernacle qui renferme de semblables reliques, et fit ainsi sa prière : « Seigneur, un impie va mourir ; vous l’avez condamné, mais vous avez dit : « Je pardonne au remords, j’accorde l’indulgence au repentir. » Voici une larme de vraie charité, qui a traversé du cœur aux yeux de l’être que j’aime le plus au monde. Je vous apporte cette larme : c’est la rançon de la souffrance ; donnez-moi le pouvoir d’attendrir le cœur de roc de l’Esprit qui va expier ses crimes. - Va, lui répondit le Maître ; va, mon enfant ; cette larme bénie peut payer bien des rançons. »

La douce enfant repartit ; elle arriva près du criminel au moment du supplice ; ce qu’elle lui dit, Dieu seul le sait ; ce qui se passa dans cet être égaré, nul ne le comprit, mais, ouvrant ses yeux à la lumière, il vit se dérouler devant lui tout un passé effrayant. Lui, que l’instrument fatal n’avait pas ébranlé ; lui, que la condamnation à mort avait fait sourire, il leva les yeux et une grosse larme, brûlante comme du plomb fondu, tomba de ses yeux. A cette preuve muette qui lui témoignait que sa prière avait été exaucée, l’ange de charité étendit sur le malheureux ses blanches ailes, recueillit cette larme et semblait dire : « Infortuné ! tu souffriras moins : j’emporte ta rédemption. »

Quel contraste peut inspirer la charité du Créateur ! l’être le plus impur sur les derniers degrés de l’échelle, et l’ange le plus chaste qui, près d’entrer dans le monde des élus, vient à un signe étendre sa protection visible sur ce paria de la société ! Dieu bénissait du haut de son puissant tribunal cette scène touchante, et nous tous, nous disions en entourant cette enfant : « Va recevoir ta récompense. » La douce messagère remonta aux cieux, sa larme de lave dans la main, et elle put dire : « Maître, il a pleuré, en voici la preuve ! - C’est bien, répondit le Seigneur ; conservez cette première goutte de rosée du cœur endurci ; que cette larme féconde aille arroser cet Esprit desséché par le mal ; mais gardez surtout la première larme que cette enfant m’a apportée ; que cette goutte d’eau devienne diamant pur, car elle est bien la perle sans tache de la vraie charité. Rapportez cet exemple aux peuples, et dites-leur : « Solidaires les uns des autres, voyez, voici une larme d’amour de l’humanité, et une larme de remords obtenue par la prière, et ces deux larmes seront les pierres les plus précieuses du vaste écrin de la charité. »

Carita.



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