Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Revue spirite — Année VII — Juin 1864.

(Langue portugaise)

QUELQUES RÉFUTATIONS.


UNE INSTRUCTION DE CATÉCHISME.

Dans un catéchisme de persévérance du diocèse de Langres,  †  à l’occasion du mandement relaté ci-dessus, une instruction fut faite sur le Spiritisme et donnée comme sujet à traiter par les élèves.

Voici la narration textuelle de l’un d’eux :

« Le Spiritisme est l’œuvre du diable qui l’a inventé. Se livrer à cela, c’est se mettre en rapport direct avec le démon. Superstition diabolique ! Dieu a souvent permis ces choses pour ranimer la foi des fidèles. Le démon fait le bon, fait le saint ; il cite des paroles de l’Écriture sainte.  »


Ce moyen de ranimer la foi nous semble assez mal choisi.

« Tertullien, qui vivait au deuxième siècle, nous rapporte qu’on faisait parler des chèvres, des tables ; c’est l’essence de l’idolâtrie. Ces opérations sataniques étaient rares dans certains pays chrétiens, et aujourd’hui elles sont très communes. Cette puissance du démon s’est montrée dans tout son éclat à l’apparition du protestantisme. »


Voilà des enfants bien convaincus de la grande puissance du démon ; ne serait-il pas à craindre que cela leur fît douter un peu de celle de Dieu, quand on voit le premier l’emporter si souvent sur le second ?

« Le Spiritisme est né en Amérique, au sein d’une famille protestante appelée Fox. Le démon apparut d’abord par des coups qui réveillaient en sursaut ; enfin, impatienté des coups, on chercha ce que ce pouvait être. La fille de M. Fox se mit à dire un jour : Frappe ici, frappe là, et on frappait où elle voulait. »


Toujours l’excitation contre les protestants ! Voilà donc des enfants instruits par la religion dans la haine contre une partie de leurs concitoyens, souvent contre des membres de leur propre famille ! Heureusement l’esprit de tolérance qui règne à notre époque y fait contrepoids, sans cela on verrait se renouveler les scènes sanglantes des siècles passés.

« Cette hérésie devint bientôt vulgaire ; elle compta bientôt cinq cent mille sectaires. Les Esprits invisibles se prenaient à faire toutes sortes de choses. A la simple demande d’un individu, des tables chargées de plusieurs centaines de livres se mouvaient ; des mains sans corps se faisaient voir. Voilà ce qui se passa en Amérique, et cela est venu en France par l’Espagne. D’abord, l’Esprit a été forcé par Dieu et les anges de dire qu’il était le diable, pour qu’il ne prenne pas dans ses pièges les honnêtes gens. »


Nous croyons être assez au courant de la marche du Spiritisme, et nous n’avons jamais ouï dire qu’il fût venu en France par l’Espagne. Serait-ce un point de l’histoire du Spiritisme à rectifier ?

On voit, de l’aveu des adversaires du Spiritisme, avec quelle rapidité l’idée nouvelle gagnait du terrain ; une idée qui, à peine éclose, conquiert cinq cent mille partisans n’est pas sans valeur et prouve le chemin qu’elle fera plus tard ; aussi, à dix ans de là, un d’eux en porte le chiffre à vingt millions en France seulement, et prédit qu’avant peu l’hérésie aura gagné les vingt autres millions. (Voir la Revue Spirite de juin 1863.)  Mais alors, si tout le monde est hérétique, que restera-t-il à l’orthodoxie ? Ne serait-ce pas le cas d’appliquer la maxime : Quand tout le monde a tort, tout le monde a raison ? Qu’aurait répondu l’instructeur, si un enfant terrible de son jeune auditoire lui eût fait cette question : « Comment se fait-il qu’à la première prédication de saint Pierre il n’y eut que trois mille Juifs convertis, tandis que le Spiritisme, qui est l’œuvre de Satan, a fait tout de suite cinq cent mille adeptes ? Est-ce que Satan est plus puissant que Dieu ? » — Il lui eût peut-être répondu : « C’est parce que c’étaient des protestants. »

« Satan dit qu’il est un bon Esprit ; mais c’est un menteur. Un jour on voulut faire parler une table ; elle ne voulut pas répondre ; on crut que c’était la présence des ecclésiastiques qui étaient là qui l’en empêchait. Enfin, deux coups vinrent avertir que l’Esprit était là. On lui demanda : — Jésus-Christ est-il fils de Dieu ? — Non. – Reconnais-tu la sainte Eucharistie ? — Oui. — La mort de Jésus-Christ a-t-elle augmenté tes souffrances  ? — Oui. »


Il y a donc des ecclésiastiques qui assistent à ces réunions diaboliques. L’enfant terrible aurait pu demander pourquoi, lorsqu’ils y viennent, ils ne font pas fuir le diable ?

« Voilà une scène diabolique. » Voici ce que disait M. Allan Kardec :

« La rouerie des Esprits mystificateurs dépasse tout ce qu’on peut imaginer : ils étaient deux Esprits, l’un faisait le bon et l’autre le mauvais ; au bout de quelques mois l’un dit : — Je m’ennuie de vous répéter des paroles mielleuses que je ne pense pas. – Es-tu donc l’Esprit du mal ? — Oui. — Ne souffres-tu pas de nous parler de Dieu, de la sainte Vierge et des saints ? — Oui. – Veux-tu le bien ou le mal ? — Le mal. – Ce n’est pas toi, l’Esprit qui parlait tout à l’heure ? — Non. — Où es-tu ? – En enfer. – Souffres-tu ? — Oui. – Toujours ? — Oui. – Es-tu soumis à Jésus-Christ ? — Non, à Lucifer. – Est-il éternel ? — Non. – Aimes-tu ce que j’ai dans la main ? (c’étaient des médailles de la sainte Vierge) – Non ; j’ai cru vous inspirer de la confiance ; l’enfer me réclame, adieu ! »

Ce récit est très dramatique sans doute, mais celui qui prouvera que nous y sommes pour quelque chose sera bien habile. Il est triste de voir à quels expédients on est obligé d’avoir recours pour donner la foi. On oublie que ces enfants deviendront grands et réfléchiront. La foi qui repose sur de telles preuves a raison de craindre les conspirations.


« Nous venons de voir l’Esprit du mal forcé d’avouer qu’il était tel. Voici une autre phrase que le crayon écrivait chez un médium : « Si tu veux te livrer à moi, âme, esprit et corps, je comblerai tes désirs ; si tu veux être avec moi, écris ton nom sous le mien ; » et il écrivait : Giefle ou Satan. Le médium tremblait, il n’écrivait pas ; il avait raison. Toutes ces séances se terminent par ces mots : « Veux-tu t’engager ? » « Le démon voudrait qu’on fasse un pacte avec lui. Livre-moi ton âme ! dit-il un jour à quelqu’un. — Qui es-tu ? répondit-on. — Je suis le démon. — Que veux-tu ? — T’avoir. Le purgatoire n’est pas ; les scélérats, les méchants, tout cela au ciel. »

Que diront ces enfants quand ils seront témoins de quelques évocations, et qu’au lieu d’un pacte infernal, ils entendront les Esprits dire : « Aimez Dieu par-dessus toutes choses, et votre prochain comme vous-mêmes ; pratiquez la charité enseignée par le Christ ; soyez bons pour tout le monde, même pour vos ennemis ; priez Dieu, et suivez ses commandements pour être heureux en ce monde et en l’autre ?


« Tous ces prodiges, toutes ces choses extraordinaires, viennent des Esprits des ténèbres. M. Home, fervent Spirite, nous dit que quelquefois le sol tressaille sous les pieds, les appartements tremblent, on frissonne ; une invisible main vous palpe sur les genoux, les épaules ; une table qui saute. On lui demande : Es-tu là ? — Oui. – Donnes-en des preuves. Et la table se lève deux fois ! »

Encore une fois, tout cela est très dramatique ; mais, parmi les jeunes auditeurs, plus d’un a sans doute désiré le voir et ne s’en fera pas faute à la première occasion. Il s’y trouvera aussi des jeunes filles impressionnables, à l’organisation délicate, qui, à la moindre démangeaison, croiront sentir la main du diable et se trouveront mal.


« Toutes ces choses sont ridicules ; la sainte Église, notre mère à tous, nous fait voir que cela n’est qu’un mensonge. »

Si tout cela est ridicule et mensonger, pourquoi donc y donner tant d’importance ? Pourquoi effrayer des enfants avec des tableaux qui n’ont aucune réalité ? S’il y a mensonge, n’est-ce pas dans ces tableaux eux-mêmes ?


« Par exemple, l’évocation des morts, il ne faut pas croire que ce soient nos parents qui nous parlent ; c’est Satan qui nous parle et qui se donne pour un mort. Certainement nous sommes en communication par la communion des saints. Nous avons, dans la vie des saints, des exemples d’apparitions de morts ; mais c’est un miracle de la sagesse divine, et ces miracles sont rares. Voici ce qu’on nous dit : Les démons se donnent quelquefois pour des morts ; ils se donnent aussi quelquefois pour des saints. »

Quelquefois n’est pas toujours ; donc il peut arriver que l’Esprit qui se communique ne soit pas un démon.


« Ils peuvent faire bien autre chose. Un jour, un médium qui ne savait pas le dessin, reproduisit, la main conduite par un Esprit, les images de Jésus-Christ et de la Sainte-Vierge, qui, présentées à quelques-uns de nos meilleurs artistes, furent jugées dignes d’être exposées. »

En entendant cela, un élève pourrait bien se dire : Si un Esprit pouvait me conduire la main pour faire mon devoir et me faire remporter un prix ! Essayons !


« Saül consulta la Pythonisse d’Endor, ( † ) et Dieu permit que Samuel lui apparût pour lui dire : Pourquoi troubles-tu mon repos ? Demain tu seras avec moi dans le tombeau. Nos Saüls de salon devraient bien penser à cette histoire. Saint Philippe de Néri nous dit : Si la sainte Vierge vous apparaît, où même Notre-Seigneur Jésus-Christ, crachez-lui au visage, parce que ce ne serait qu’une tromperie du démon pour vous induire en erreur. »

Que devient alors l’apparition de Notre-Dame de la Salette  †  à deux pauvres enfants ? Selon cette instruction de catéchisme, ils auraient dû lui cracher au visage.


« Notre saint père le pape Pie IX a défendu expressément de se livrer à ces choses. Mgr l’évêque de Langres, et beaucoup d’autres encore, en ont fait autant. Il y a danger pour sa vie : deux vieillard se suicidèrent, parce que les Esprits leur avaient dit qu’après leur mort ils jouiraient d’un bonheur infini ; danger pour la raison : plusieurs médiums sont devenus fous, et l’on comptait dans une maison d’aliénés plus de quarante individus que le Spiritisme avait rendus fous. »

Nous ne connaissons pas encore la bulle du pape qui défend expressément de s’occuper de ces choses-là ; si elle existait, Mgr de Langres et les autres n’auraient pas manqué de la mentionner. L’histoire des deux vieillards, auxquels il est fait allusion, est inexacte ; il a été prouvé, par des pièces officielles, déposées au tribunal, et notamment des lettres écrites par eux avant leur mort, qu’ils se sont suicidés par suite de pertes d’argent, et la crainte de tomber dans la misère (Voir la Revue spirite d’avril 1863). Celle de quarante individus enfermés dans une maison d’aliénés n’est pas plus véridique. On serait bien embarrassé de la justifier par les noms de ces prétendus fous dont un premier journal a porté le nombre à quatre, un second à quarante, un troisième à quatre cents, un cinquième a dit qu’on travaillait à l’agrandissement de l’hospice. [Voir : Ordonnance de monseigneur l’évêque d’Alger contre le Spiritisme.] Un instructeur de catéchisme devrait puiser ses renseignements historiques ailleurs que dans les canards des journaux.

Les enfants auxquels on débite sérieusement de pareilles choses l’acceptent de confiance ; mais plus la confiance a été grande, plus forte est la réaction en sens inverse quand, plus tard, ils viennent à savoir la vérité. Ceci dit en général et non exclusivement pour le Spiritisme.

Si nous avons analysé ce travail d’un enfant, il est bien entendu que ce n’est pas l’opinion de l’enfant que nous réfutons, mais celle dont sa narration est le résumé. Si l’on scrutait avec soin toutes les instructions de cette nature, on serait moins étonné des fruits qu’on en récolte plus tard. Pour instruire l’enfance il faut un grand tact et beaucoup d’expérience, car on ne se figure pas la portée que peut avoir une seule parole imprudente qui, de même que la graine d’une mauvaise herbe, germe dans ces jeunes imaginations comme dans une terre vierge.

Il semble que les adversaires du Spiritisme ne trouvent pas que l’idée en soit assez répandue ; on les dirait poussés malgré eux à s’ingénier les moyens de la répandre encore davantage. Après les sermons, dont le résultat est connu, on n’en pouvait trouver un plus efficace que d’en faire le sujet des instructions et des devoirs du catéchisme. Les sermons agissent sur la génération qui s’en va ; ces instructions y disposent la génération qui arrive. Nous aurions donc bien tort de leur en savoir mauvais gré.


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