Le Chemin Écriture du Spiritisme Chrétien.
Doctrine spirite - 1re partie. ©

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Qu’est-ce que le Spiritisme.

(Première version) n
(Langue portugaise)

Chapitre premier.


PETITE CONFÉRENCE SPIRITE.


DEUXIÈME ENTRETIEN. — LE SCEPTIQUE.
(Sommaire)


LES MÉDIUMS INTÉRESSÉS.


21. Le Visiteur. — Avant de se livrer à une étude de longue haleine, certaines personnes voudraient avoir la certitude de ne pas perdre leur temps, certitude que leur donnerait un fait concluant, fût-il obtenu à prix d’argent.


A. K. — Chez celui qui ne veut pas se donner la peine d’étudier, il y a plus de curiosité que d’envie réelle de s’instruire ; or, les Esprits n’aiment pas plus les curieux que je ne les aime moi-même. D’ailleurs la cupidité leur est surtout antipathique, et ils ne se prêtent à rien de ce qui peut la satisfaire ; il faudrait s’en faire une idée bien fausse pour croire que des Esprits supérieurs, comme Fénelon, Bossuet, Pascal, saint Augustin, par exemple, se mettent aux ordres du premier venu à tant par heure. Non, Monsieur, les communications d’outre-tombe sont une chose trop grave, et qui exige trop de respect, pour servir d’exhibition.

Nous savons d’ailleurs que les phénomènes spirites ne marchent pas comme les roues d’un mécanisme, puisqu’ils dépendent de la volonté des Esprits ; en admettant même l’aptitude médianimique, nul ne peut répondre de les obtenir à tel moment donné. Si les incrédules sont portés à suspecter la bonne foi des médiums en général, ce serait bien pis s’il y avait chez eux un stimulant d’intérêt ; on pourrait à bon droit suspecter le médium rétribué de donner le coup de pouce quand l’Esprit ne donnerait pas, parce qu’il lui faudrait, avant tout, gagner son argent. Outre que le désintéressement absolu est la meilleure garantie de sincérité, il répugnerait à la raison de faire venir à prix d’argent les Esprits des personnes qui nous sont chères, en supposant qu’ils y consentissent, ce qui est plus que douteux ; il n’y aurait, dans tous les cas, que des Esprits de bas étage, peu scrupuleux sur les moyens, et qui ne mériteraient aucune confiance ; et encore ceux-là mêmes se font-ils souvent un malin plaisir de déjouer les combinaisons et les calculs de leur cornac.

La nature de la faculté médianimique s’oppose donc à ce qu’elle devienne une profession, puisqu’elle dépend d’une volonté étrangère au médium, et qu’elle peut lui faire défaut au moment où il en aurait besoin, à moins qu’il n’y supplée par l’adresse. Mais en admettant même une entière bonne foi,dès lors que les phénomènes ne s’obtiennent pas à volonté, ce serait en effet du hasard si, dans la séance que l’on aurait payée, se produisait précisément celui que l’on désirerait voir pour se convaincre.

Vous donneriez cent mille francs à un médium, que vous ne lui feriez pas obtenir des Esprits ce que ceux-ci ne veulent pas faire ; cet appât, qui dénaturerait l’intention et la transformerait en un violent désir de lucre, serait même au contraire un motif pour qu’il ne l’obtînt pas. Si l’on est bien pénétré de cette vérité, que l’affection et la sympathie sont les plus puissants mobiles d’attraction pour les Esprits, on comprendra qu’ils ne peuvent être sollicités par la pensée de s’en servir pour gagner de l’argent.

Celui donc qui a besoin de faits pour se convaincre, doit prouver aux Esprits sa bonne volonté par une observation sérieuse et patiente, s’il veut en être secondé ; mais s’il est vrai que la foi ne se commande pas, il ne l’est pas moins de dire qu’elle ne s’achète pas.


22. Le Visiteur. — Je comprends ce raisonnement au point de vue moral ; cependant n’est-il pas juste que celui qui donne son temps dans l’intérêt de la cause, en soit indemnisé, si cela l’empêche de travailler pour vivre ?


A. K. — D’abord est-ce bien dans l’intérêt de la cause qu’il le fait, ou dans le sien propre ? S’il a quitté son état, c’est qu’il n’en était pas satisfait, et qu’il espérait gagner davantage ou avoir moins de peine à ce nouveau métier. Il n’y a aucun dévoûment à donner son temps quand c’est pour en tirer profit. C’est absolument comme si l’on disait que c’est dans l’intérêt de l’humanité que le boulanger fabrique du pain. La médiumnité n’est pas la seule ressource ; sans elle, ils seraient bien obligés de gagner leur vie autrement. Les médiums vraiment sérieux et dévoués, lorsqu’ils n’ont pas une existence indépendante, cherchent les moyens de vivre dans le travail ordinaire, et ne quittent point leur état ; ils ne consacrent à la médiumnité que le temps qu’ils peuvent y donner sans préjudice ; s’ils prennent sur leurs loisirs ou leur repos, c’est alors du dévoûment dont on leur sait gré ; on les en estime et respecte davantage.

La multiplicité des médiums dans les familles rend d’ailleurs les médiums de profession inutiles, en supposant même qu’ils offrissent toutes les garanties désirables, ce qui est fort rare. Sans le discrédit qui s’est attaché à ce genre d’exploitation, et auquel je me félicite d’avoir grandement contribué, on aurait vu pulluler les médiums mercenaires et les journaux se couvrir de leurs réclames ; or, pour un qui aurait pu être loyal, il y aurait eu cent charlatans qui, abusant d’une faculté réelle ou simulée, aurait fait le plus grand tort au spiritisme. C’est donc comme principe, que tous ceux qui voient dans le spiritisme autre chose qu’une exhibition de phénomènes curieux, qui comprennent et ont à cœur la dignité, la considération et les véritables intérêts de la doctrine, réprouvent toute espèce de spéculation sous quelque forme ou déguisement qu’elle se présente. Les médiums sérieux et sincères, et je donne ce nom à ceux qui comprennent la sainteté du mandat que Dieu leur a confié, évitent jusqu’aux apparences de ce qui pourrait faire planer sur eux le moindre soupçon de cupidité ; l’accusation de tirer un profit quelconque de leur faculté, serait regardée par eux comme une injure.

Convenez, Monsieur, tout incrédule que vous êtes, qu’un médium dans ces conditions-là, ferait sur vous une tout autre impression que si vous aviez payé votre place pour le voir opérer, ou, lors même que vous eussiez obtenu une entrée de faveur, si vous saviez qu’il y a derrière tout cela une question d’argent ; convenez qu’en voyant le premier animé d’un véritable sentiment religieux, stimulé par la foi seule, et non par l’appât du gain, involontairement il commandera votre respect, fût-il le plus humble prolétaire, et vous inspirera plus de confiance, car vous n’aurez aucun motif de suspecter sa loyauté. Eh bien ! Monsieur, vous en trouverez comme cela mille pour un, et c’est une des causes qui ont puissamment contribué au crédit et à la propagation de la doctrine, tandis que si elle n’avait eu que des interprètes intéressés, elle ne compterait pas le quart des adeptes qu’elle a aujourd’hui.

On le comprend si bien, que les médiums de profession sont excessivement rares, en France du moins ; qu’ils sont inconnus dans la plupart des centres spirites de province, où la réputation de mercenaires suffirait pour les exclure de tous les groupes sérieux, et où, pour eux, le métier ne serait pas lucratif, en raison du discrédit dont il serait l’objet et de la concurrence des médiums désintéressés qui se trouvent partout.

Pour suppléer, soit à la faculté qui leur manque, soit à l’insuffisance de la clientèle, il est de soi-disant médiums qui cumulent, en pratiquant le jeu de cartes, le blanc d’œuf, le marc de café, etc., afin de satisfaire tous les goûts, espérant par ce moyen, à défaut des spirites, attirer ceux qui croient encore à ces stupidités. S’ils ne faisaient tort qu’à eux-mêmes, le mal serait peu de chose ; mais il y a des gens qui, sans aller plus loin, confondent l’abus et la réalité, puis les malintentionnés qui en profitent pour dire que c’est là en quoi consiste le spiritisme. Vous voyez donc, Monsieur, que l’exploitation de la médiumnité conduisant à des abus préjudiciables à la doctrine, le spiritisme sérieux a raison de la désavouer, et de la répudier comme auxiliaire.


23. Le Visiteur. — Tout cela est très logique, j’en conviens, mais les médiums désintéressés ne sont pas à la disposition du premier venu, et l’on ne peut se permettre d’aller les déranger, tandis qu’on ne se fait pas scrupule d’aller chez celui qui se fait payer, parce qu’on sait ne pas lui faire perdre son temps. S’il y avait des médiums publics, ce serait une facilité pour les personnes qui veulent se convaincre.


A. K. — Mais si les médiums publics, comme vous les appelez, n’offrent pas les garanties voulues, de quelle utilité peuvent-ils être pour la conviction ? L’inconvénient que vous signalez ne détruit pas ceux bien autrement graves que j’ai développés. On irait chez eux plus par amusement ou pour se faire dire la bonne aventure que pour s’instruire. Celui qui veut sérieusement se convaincre en trouve tôt ou tard les moyens s’il y met de la persévérance et de la bonne volonté ; mais ce n’est pas parce qu’il aura assisté à une séance qu’il sera convaincu, s’il n’y est préparé. S’il en emporte une impression défavorable, il le sera moins en sortant qu’en entrant, et peut-être sera-t-il dégoûté de poursuivre une étude où il n’aura vu rien de sérieux ; c’est ce que prouve l’expérience.

Mais à côté des considérations morales, les progrès de la science spirite nous montrent aujourd’hui une difficulté matérielle, que l’on ne soupçonnait pas dans le principe, en nous faisant mieux connaître les conditions dans lesquelles se produisent les manifestations. Cette difficulté tient aux affinités fluidiques qui doivent exister entre l’Esprit évoqué et le médium.

Je mets de côté toute pensée de fraude et de supercherie, et je suppose la plus entière loyauté. Pour qu’un médium de profession puisse offrir toute sécurité aux personnes qui viendraient le consulter, il faudrait qu’il possédât une faculté permanente et universelle, c’est-à-dire qu’il pût communiquer facilement avec tout Esprit et à tout moment donné, pour être constamment à la disposition du public, comme un médecin, et satisfaire à toutes les évocations qui lui seraient demandées ; or, c’est ce qui n’existe chez aucun médium, pas plus chez ceux qui sont désintéressés que chez les autres, et cela par des causes indépendantes de la volonté de l’Esprit, mais que je ne puis développer ici, parce que je ne vous fais pas un cours de spiritisme.

Je me bornerai à dire que les affinités fluidiques, qui sont le principe même des facultés médianimiques, sont individuelles et non générales, qu’elles peuvent exister du médium à tel Esprit et non à tel autre ; que sans ces affinités, dont les nuances sont très multiples, les communications sont incomplètes, fausses ou impossibles ; que le plus souvent l’assimilation fluidique entre l’Esprit et le médium ne s’établit qu’à la longue, et qu’il n’arrive pas une fois sur dix qu’elle soit complète dès la première fois. La médiumnité, comme vous le voyez, Monsieur, est subordonnée à des lois en quelque sorte organiques, auxquelles tout médium est assujetti ; or, on ne peut nier que ce ne soit un écueil pour la médiumnité de profession, puisque la possibilité et l’exactitude des communications tiennent à des causes indépendantes du médium et de l’Esprit. (Voir ci-après, chap. II, paragraphe des médiums.)

Si donc nous repoussons l’exploitation de la médiumnité, ce n’est ni par caprice, ni par esprit de système, mais parce que les principes mêmes qui régissent les rapports avec le monde invisible, s’opposent à la régularité et à la précision nécessaires pour celui qui se met à la disposition du public, et que le désir de satisfaire une clientèle payante conduit à l’abus. Je n’en conclus pas que tous les médiums intéressés sont des charlatans, mais je dis que l’appât du gain pousse au charlatanisme et autorise le soupçon de supercherie, s’il ne le justifie pas. Celui qui veut se convaincre doit avant tout chercher les éléments de sincérité.



[1] Cette SIXIÈME ÉDITION de 1865, est une révision de la PREMIÈRE VERSION de ce livre publiée en 1859, il a été considérablement augmentée par l’auteur (v. Revue spirite). Il y a une image de ce chapitre dans le service Google - Recherche de livres. (Qu’est-ce que le Spiritisme.)


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